Dessin du navire négrier Les deux amis, affrété par Guérin l’Ainé, à son départ de l’île d’Aix le 9 novembre 1790 Extrait du livre de bord d’un des ses officiers (avec l’aimable l’autorisation de la Librairie Le Bail, 13, rue F. Sauton à Paris) Rochefort, port de guerre, arsenal militaire, qui connut certains fastes à toutes les époques de son histoire, la Corderie Royale, ses constructions navales expérimentales et fabuleuses, le pont Transbordeur, les serres du roi, ses jardins et plus encore, mais il y eut aussi des moments moins glorieux, voire sombre dans la vie de notre cité.
De très belles et argumentées conférences depuis de nombreuses années mettent en relief ces moments moins brillants de ce triste passé, le bagne, les guerres à Rochefort, mais aujourd'hui j’aimerais parler ou du moins ressortir un texte très précis sur la traite négrière Rochefortaise, il n'est pas question ici de procès, ni même de jugement, seule l'histoire et les faits sont intéressants.
C'est en faisant des recherches sur un tout autre sujet, que je suis tombé par hasard sur l'article publié par la Société de Géographie Rochefortaise dans le n°47 de sa revue Roccafortis de janvier 2011.
« Cet article reprend la communication de Christophe Cadiou-Quella prononcée en mars 2010 à Brouage puis au Service historique de la Défense /Marine de Rochefort, dans le cadre des rencontres Mémoires de l’esclavage. Chairs noires et pierres blanches.Une grande partie des documents dépouillés et des illustrations proviennent d’ailleurs du SHD/M de Rochefort, qui a organisé sur le sujet tout au long de l’année 2010, une très importante exposition intitulée La Marine royale et la traite négrière aux XVIIIe et XIXe siècles. Nous remercions M. Morgat, conservateur du SHD/M pour nous avoir autorisés à reproduire certains documents de cette exposition. »
Un article qui montre la part active qu'a prise une certaine élite Rochefortaise dans ce commerce alors florissant, certes, ce n'est pas la plus engagée des villes de France, ni la plus active, mais comme le dit si bien Serge Daguet (Historien spécialiste de l'histoire maritime et de l'histoire de l'Afrique. Professeur d'histoire de l'Afrique à l'Université de Lille-III, directeur de l'UFR des sciences historiques, artistiques et politiques (en 1992) .
« Est-on moins négrier pour avoir déporté un seul Noir esclave qu’une cargaison de deux cents individus? »
Je ne pense pas en effet, je ne reproduirais ici que quelques extraits de cette étude très documentée, mais je vous invite à prendre un peu de temps pour en lire l'intégralité en suivant le liens :
Rochefort et la traite négrière au XVIIIe siècle.« « Le commerce honteux de négociants vertueux et d'une Marine insoupçonnable », ainsi l’auteur qualifie-t-il ce trafic qu’il exhume d’un passé oublié. Certes, la traite n’a pas eu à Rochefort les dimensions qu’elle a prises à Nantes, La Rochelle ou Bordeaux mais elle a connu un temps de splendeur à la fin du XVIIIe siècle. Fruit d’une recherche originale, appuyée sur l’inventaire critique de très nombreuses sources, l’article analyse les caractéristiques d’un commerce risqué mais fructueux et en fait ressortir l’originalité dans un cadre national, en bousculant au passage des images d’une histoire locale convenue. Dans ce port-arsenal de création récente, ne disposant pas d’une riche bourgeoisie négociante ancienne, sont mis en lumière les réseaux avec d’autres négriers et surtout les relations avec l’État, ses grands commis, sa marine et sa politique militaire et économique. »
Noirs à Saint-Domingue, d’après une gravure en couleur de A. Brunias (B.N, Cabinet des estampes)"La spécificité rochefortaise
En partant des chiffres fournis par Jean Mettas, Rochefort aurait armé 20 expéditions négrières. Au regard des 3 343 qu’il recense, c’est plus que marginal : seulement 0,6% ! Comparativement aux grands ports négriers, c’est 71 fois moins que le nombre d’expéditions nantaises, 21 fois moins que La Rochelle et encore 4 fois moins que Marseille, pourtant classée dans la cour des petits ! D’emblée, la faiblesse des chiffres ne favorise pas une étude sérielle et statistique, et minimise à l’avance toute conclusion trop glo-bale. Y ajouter les 4 ou 5 expéditions évoquées plus haut ne modifie en rien la modestie de la traite rochefortaise à l’échelle nationale.
Néanmoins, une remarque s’impose : Rochefort est le premier port-arsenal négrier du royaume, devant Brest, qui totalise 7 expéditions, tandis que Toulon et Cherbourg n’en ont armé aucune. Le Havre, également ville arsenal, est loin devant, avec 399 expéditions (524, si on y ajoute son annexe de Honfleur), mais le port s’adonne en grande partie au commerce depuis le XVIIe siècle et de plus en plus au cours du XVIIIe siècle. Lorient, autre port militaire, comptabilise 156 expéditions, mais l’essentiel de la traite Lorientaise relève de l’activité de la Compagnie des Indes et décline fortement à la fin du siècle. Par son statut singulier d’arsenal, Rochefort offre donc l’occasion d’examiner les rapports entre la Marine du Roi et la traite négrière. C’est peut-être là la principale spécificité de la traite rochefortaise."
A suivre sur le liens :
Rochefort et la traite négrière au XVIIIe siècle.Société de Géographie de Rochefort
Situé à la vieille paroisse, ouvert seulement le mercredi après-midi, un lieu fantastique où découvrir les trésors archéologiques de la région Rochefortaise et une exposition fantastique sur le bagne Rochefortais seulement jusqu'au mois d'Avril.
Service historique de la DéfenseEncore un lieu méconnu de Rochefort, le SHD en est pourtant une mémoire très importante de la ville depuis 1666, jusqu’à une époque récente, avec 7 km linéaires d'archives, 25 000 monographies et 600 titres de périodiques dont une cinquantaine de titres vivants, ainsi 402 objets de patrimoine et de symbolique militaire.
Serge Daget toutes les images sont extraites de l'article du Roccafortis de janvier 2011.
Une étude soignée et passionnante sur une facette très mal connue de Rochefort.